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Les biberonneuses… ces bonnes fées !

Les chatons abandonnés ou nés de chats errants tentent de survivre comme ils peuvent. Mais les plus jeunes dépendent entièrement de leur maman. Des bébés abandonnés seuls ou qui perdent leur mère errante d’un accident ou de maltraitance après seulement quelques jours de vie sont condamnés de manière certaine à une grande souffrance et à la mort. A moins que… A moins qu’une bonne fée ne se penche sur leur berceau.

De nombreuses associations s’emploient chaque jour à sauvegarder chats et chatons en situation précaire, bien qu’elles soient dépassées par l’ampleur du phénomène. Lorsque des orphelins ne sont pas sevrés, il est indispensable de trouver des mamans de substitution.

Il est possible de confier les petits à une autre chatte allaitante qui les prendra sous son aile. Mais cette solution n’est pas souvent réalisable car il y a urgence ! Les bébés ne pourront pas vivre très longtemps sans boire et manger ; les sauver se joue souvent à quelques heures près. C’est là qu’interviennent les biberonneuses (oui… nous l’écrivons au féminin car il faut bien reconnaître que les hommes qui s’y collent sont rares).

Nous avons rencontré Véronique, qui biberonne depuis quelques mois pour l’antenne de Namur de l’asbl CatRescue. [1] Nous lui avons demandé de nous raconter son quotidien de biberonneuse.

Cap Chats : Bonjour Véronique. Tu es biberonneuse depuis le mois de septembre 2016. Pourquoi cette décision, qu’est-ce qui t’a motivée ?

Véronique : « Je n’ai pas réfléchi. J’ai reçu un appel de Valérie, la responsable de l’antenne de Namur de CatRescue, qui avait été contactée pour des chatons de 10 jours jetés dans des buissons proches de mon domicile. Ils hurlaient. Sans réfléchir, j’ai répondu positivement.

La seconde fois, c’était un appel via notre page Facebook pour des chatons de 20 jours. Ils ont également hurlé dans des buissons durant tout un week-end. Des gens les ont libérés et me les ont apportés. Ces seconds chatons avaient été nourris au lait de vache… ils sont arrivés à la maison avec une entérite très grave, l’un des deux était très faible. »

Donner le biberon à un chaton ne s’improvise pas tout à fait. Comment as-tu appris les bons gestes et quels sont-ils ?

V. : « En effet, on ne peut pas s’improviser biberonneuse, il y a des gestes très importants, il faut s’informer.

Ayant des enfants en bas âge, je me souvenais des gestes pour la préparation des biberons mais par contre, on ne donne pas le biberon à un chaton comme à un enfant. Un chaton ne se biberonne pas sur le dos, il risque de s’étouffer !

J’ai rapidement effectué des recherches sur Internet et j’ai trouvé une page qui m’a fortement aidée. Bien sûr, j’ai suivi les dosages recommandés sur la boîte de lait maternisé pour chatons. Pour les massages nécessaires après le biberon, j’ai utilisé un gant de toilette humidifié à l’eau tiède pour stimuler l’élimination au lieu du coton-tige que montre la vidéo, et j’ai massé avec le bout des doigts sur le ventre.

 

 

Pour les horaires des repas, c’était à la demande. Forcément au début, ils buvaient vite donc ils calaient rapidement. Peu à peu, ils ont régulé leur rythme. »

Comme tous les bébés, un jeune chaton boit très souvent. Peux-tu expliquer le rythme des journées ?

V. : « Selon les chatons, c’est toutes les 2 ou 3 heures, nuits comprises. Biberonner n’est pas compatible avec une vie professionnelle.

Personnellement, ça me prenait +/- 45 minutes voire 1 heure (quand ils grandissent) car je prenais mon temps afin qu’ils ne boivent pas trop vite, ainsi que pour les masser, les toiletter, jouer avec eux, leur faire des câlins, les sociabiliser un maximum. Ensuite, je les remettais sur le coussin chauffant (bouillotte) dans un “nid” pour qu’ils soient protégés et dans l’obscurité pour ne pas être dérangés. »

Jusque quel âge leur donnes-tu le biberon ?

V. : « Là aussi, j’ai fait appel à mon ami Google. J’ai notamment trouvé l’information sur la page de croquettes chaton premier âge d’un site de vente en ligne.

Dès 4 semaines, j’ai commencé les croquettes mouillées, ils ont détesté ! Alors j’ai mis des croquettes non mouillées qu’ils ont appréciées ainsi que de la nourriture humide de haute qualité, ils adoraient celle au poisson !

Je les ai biberonnés jusqu’à l’âge de 2 mois environ mais bien sûr, en grandissant, ils avaient moins de biberons. C’était surtout le matin et le soir, au moment câlin avant le dodo. D’autant plus que j’avais 2 autres chatons à biberonner, je ne voulais pas que les 2 premiers soient jaloux et qu’ils se sentent mis sur le côté. »

La maman chat est la mère nourricière mais c’est aussi elle qui s’occupe de l’apprentissage et de l’éducation de ses chatons. Comment se substitue-t-on à ces rôles-là ?

V. : « Normalement, c’est la biberonneuse qui se charge de l’apprentissage. Ici, dès qu’ils ont eu +/- 20 jours, j’ai placé un bac avec de la litière. Je les déposais dans le bac tout en faisant des petits massages ventraux, je grattais la litière aussi. D’eux-mêmes, ils sont allés au bac tout seul. Au début, je les félicitais.

Pour les jeux, mon mari et moi jouions avec eux, les prenant délicatement par l’échine quand ils faisaient mal mais leur faisant aussi bien sûr des câlins.

Nous avons eu la chance d’avoir nos deux chats, Kirby et Maiko, qui leur ont beaucoup enseigné : propreté, câlins, jeux, bagarres et surtout les bêtises ! »

Les chatons que tu maternes ainsi sont destinés à être mis à l’adoption. Cela doit être difficile de s’en séparer après une relation aussi intime avec eux…

V. : « Oui, dès qu’ils sont “prêts” c’est-à-dire sevrés, propres, en bonne santé et sociables, ils peuvent être proposés à l’adoption. Se séparer d’eux est vraiment difficile, nous avons beaucoup pleuré et nos enfants aussi.

Un des 4 chatons a développé une relation fusionnelle avec moi, je n’ai pas pu le mettre à l’adoption. Honnêtement, sur les quatre, nous en avons adopté trois. Le quatrième a été adopté par une amie. Je pense qu’on ne peut pas se préparer à ça. Celui qui a été adopté par mon amie, il n’y a pas un seul jour qui passe sans que toute la famille ne pense à lui.

C’est très difficile à gérer, je ne sais pas comment arriver à les laisser partir ; c’est une partie du cœur qui est arrachée, aussi bien soient-ils dans leur nouvelle maison. »

Qu’aurais-tu envie de dire à quelqu’un qui est tenté de biberonner mais hésite encore ?

V. : « Je dirais que c’est une merveilleuse aventure !!! Bien sûr, il faut avoir du temps, de la patience, comme pour un enfant. Allez-y, il y a beaucoup d’aide sur Internet, beaucoup de personnes peuvent conseiller aussi. Vous sauverez des vies.

Le point difficile à ne pas oublier : il faut aussi être préparé(e) à ce que des chatons ne survivent pas. Ils viennent de la rue et arrivent parfois dans des états compliqués (maladie, malformation, trop faible, etc.) »

Merci beaucoup d’avoir répondu à nos questions. J’espère que cela aura permis aux lecteurs de prendre la mesure de l’engagement que cela représente mais aussi de l’importance d’avoir des personnes comme toi pour la survie de ces bébés orphelins. Un grand merci pour eux.

Et qui sait… peut-être aurons-nous suscité des vocations ?


[1Edit mai 2017 : depuis la rédaction de notre article, l’antenne de Namur de CatRescue a fermé ses portes, cédant la place à une nouvelle association créée par les mêmes personnes : Les Loulous de Marylou