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Bien-être animal : changements en vue en Région bruxelloise
— Carte blanche —
Des choses bougent en Région bruxelloise : elle se dote enfin d’un "code du bien-être animal". Bien sûr, aucune réglementation ni aucun décret ne pourra être suffisant à lui seul sans grandes campagnes de sensibilisation, d’éducation, de pédagogie sur le long court. Mais il aura le mérite d’exister et de donner aux acteurs de la protection animale une base légale renforcée sur laquelle s’appuyer. Acteurs qui semblent pourtant une fois encore les éternels oubliés, singulièrement ceux qui oeuvrent sur le terrain...
Ce nouveau code vient compléter ou amender une vieille réglementation datant de 1986 qui n’était plus vraiment adaptée aux réalités actuelles, ainsi que d’autres décrets. Il était temps que la Région bruxelloise se dote à son tour d’un code du bien-être animal, à l’instar de la Flandre et de la Wallonie.
Parmi les 10 mesures phares présentées dans le communiqué de presse du 7 septembre 2023, il y a à boire et à manger. Si certaines mesures paraissent excellentes, ou évitent quelques écueils, d’autres paraissent incomplètes ou manquant de précisions. Il est néanmoins difficile de se prononcer de manière définitive tant que le texte intégral n’est pas connu. On peut toutefois se hasarder à une première analyse des mesures telles que présentées.
Je suis personnellement ravie d’y lire l’interdiction totale de vente d’animaux vivants sur les marchés. J’appelle de tous mes voeux que cela s’étende aux jardineries et animaleries.
Je trouve l’idée des "travaux d’intérêt animalier" excellente, a priori. Elle me paraît plus porteuse en termes de pédagogie et de sensibilisation qu’une simple amende. Et plus juste socialement ! J’attends néanmoins de voir comment cela sera organisé sur le terrain avant d’applaudir. Les infractions sont nombreuses et cela soulève pas mal de questions.
- Comment les refuges peuvent-ils absorber un afflux de "bénévoles punis" qu’il faudra former et surveiller, si les condamnations sont réellement prononcées à hauteur du nombre d’infractions ?
- Comment la justice, déjà surchargée, va-t-elle pouvoir suivre ?
- Ces travaux d’intérêt animalier vont-ils aussi diriger les contrevenants vers les zoos, dont l’existence-même soulève de nombreuses questions en matière de bien-être animal ?
Le communiqué ne reprend que "10 mesures phares". Quelles sont les autres ?
- Rien sur le transport animalier, pour lequel la base réglementaire européenne est trop timide ? Cet été, combien ai-je croisé de camions transportant des animaux entassés en plein cagnard ?
- Rien non plus sur les cirques, dont seuls les animaux sauvages sont actuellement exclus ?
- Rien sur la (sur)exploitation d’animaux à fins de loisirs tels que, par exemple, promenades touristiques à cheval, à dos d’âne, en calèche, etc. dont les actualités nous rappellent de temps en temps leurs conditions en nous annonçant un décès d’épuisement ?
Je suis heureuse de constater que la Région bruxelloise n’a pas cédé au chant des sirènes wallon en matière de permis de détention. On sait celui-ci totalement inutile et inopérant. Il n’a pour seul effet que de décourager encore un peu plus l’adoption en refuge au profit des "animaux gratuits".
Et pour terminer, concernant l’instauration de "clients mystères", j’ai envie de dire "Enfin !". Il est dommage qu’il faille une réglementation pour rendre cela possible, d’ailleurs. Mais s’attaquer aux réseaux sociaux revient quelque peu à vider l’océan avec une petite cuillère.
- Qui seront "les personnes mandatées" ?
- Les moyens en termes de ressources humaines et administratifs seront-ils débloqués ou bien cela restera-t-il un voeu pieu ?
- En outre, que vont devenir tous ces animaux proposés illégalement ? Les diriger vers des refuges est tout simplement hors de propos tant ceux-ci sur sursaturés et ne peuvent déjà pas faire face à la misère du terrain, là où les animaux sont réellement en danger de mort. Va-t-on alors les sacrifier sur l’autel de la bêtise de leurs propriétaires ?
A cet égard :
- Le décret ne contient pas une ligne, pas un mot sur les aides financières substantielles dont les refuges ont besoin.
- Pas un mot, pas un espoir de solution pour les nombreux refuges bruxellois en manque de locaux plus vastes et mieux adaptés, alors même que le code bruxellois du logement permet de dessaisir un propriétaire de la gestion de son bien par un opérateur public durant minimum 9 ans en cas de non-occupation prolongée et insuffisamment justifiée. Un décret auquel les autorités recourent bien trop peu, là aussi, y compris pour loger des êtres humains.
- Pas un mot en vue d’un statut et d’aides aux nombreux groupes de bénévoles de terrains qui pallient comme elles peuvent, sur leurs deniers personnels, au manque de places en refuge, aux besoins de nourrissage, de soins, de trappage indispensables en amont du travail des refuges.
- Pas un mot, en résumé, sur une politique volontariste vis-à-vis des errants dont le nombre grandissant déclenche ou attise le mésamour de certains habitants, entraînant à son tour de la maltraitance.
La rédaction de ce nouveau code est notamment basée sur une consultation populaire, ce qui en soi est une excellente idée. Mais il semble, corollairement, passer à côté de certains pans du travail que le grand public, dans sa majorité, ne pouvait que difficilement aborder car il n’en a tout simplement pas conscience ou en minimise l’ampleur et l’importance.
J’attends en tous cas avec impatience de lire les détails des mesures annoncées, de découvrir quelles sont les autres mesures contenues dans le code, mais également de voir les arrêtés d’application qui suivront.
Ces 10 mesures sont à découvrir sur le site du ministre du bien-être animal, Bernard Clerfayt : https://clerfayt.brussels/fr/10-mesures-phares-code-bruxellois-bien-etre-animal.